Jack Dion, l’éditorialiste de Marianne fait ce 20 mars une mise au point plus qu’urgente et nécessaire sur la dérive idéologique que connaît une partie de la mouvance « antiraciste ».
À lire pour rétablir de la clarté et de la force dans le nécessaire combat antiraciste et contre l’antisémitisme :
« La mouvance antiraciste malade du confusionnisme
Ce samedi, à Paris et dans 18 autres villes du pays, des manifestations doivent se tenir « contre tous les racismes et le fascisme ». Une initiative louable si seulement l'appel à manifester n'était pas si sélectif dans ses indignations. Et si seulement, parmi les groupes appelant à la manif, on ne trouvait pas des organisations douteuses proches de l'UOIF et le Parti des Indigènes de la République...
Des manifestations vont être organisées un peu partout en France à l’occasion de la journée mondiale contre le racisme. Tout esprit attaché à la fraternité et à l’humanisme devrait s’en réjouir, a fortiori dans le contexte d’une déferlante de violence marquée par le rejet tribal de l’Autre, à Paris, à Copenhague, à Mossoul, à Tunis, ou ailleurs.
Quand les peuples se mobilisent pour crier leur rejet de la haine, de la xénophobie ou du repli ethnique sous toutes ses formes, on a envie d’applaudir sans arrière-pensée. Encore faut-il être clair, parler net, sans brouiller les pistes et sans jouer à l’apprenti sorcier.
De ce point de vue, on est loin du compte. On peut même dire que les manifestations vont se dérouler dans un climat de confusionnisme propre à toutes les dérives.
Le texte de l’appel signé par les organisations qui invitent à descendre dans la rue dénonce « tous les racismes et le fascisme ». Très bien. On s’attend donc à une condamnation ferme d’une des formes contemporaines du fascisme, à savoir le djihadisme qui sème la terreur au nom des préceptes d’un Etat islamique dont l’interprétation violente du Coran fait des musulmans ses premières victimes.
Or il n’est fait aucune allusion au fascisme islamique. Le texte dénonce« l’extrême droite » (classique et normal). Il met en garde contre des « lois liberticides » (ça peut se discuter). Il ressert en plat de résistance le brouet fumeux de « l’islamophobie » qui permet à certains d’assimiler toute critique de l’islam à du racisme (c’est l’argument qui a justifié la tuerie de Charlie Hebdo). Il demande sans plus de précision « le retrait des lois racistes dirigées contre les musulmans » (qui n’existent pas, sauf à considérer que la loi sur les signes religieux à l’école relève de cette catégorie).
En revanche, il ne souffle mot du djihadisme, comme si ce dernier était une école d’art contemporain, alors qu’il est le bras armé d’une folie fasciste et raciste qui assimile les « mécréants » à des gens destinés par nature au couteau purificateur de l’islam pur et dur. Albert Camus disait : « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ». En l’espèce, on peut difficilement faire pire.
« Cet étrange philosémitisme... »
Ajoutons que parmi les organisations qui s’invitent aux festivités de l’antiracisme se trouvent des mouvements qui feraient se retourner dans leurs tombes les pères tutélaires du combat émancipateur. Voir des associations proches de l'UOIF (Union des organisations islamiques de France, associée au meeting de Saint-Denis le 6 mars sur les mêmes thèmes) homophobe, antiféministe et ultraréactionnaire, appeler à battre le pavé de la fraternité, cela fait drôle. Mais que dire du Parti des Indigènes de la République (PIR) ? L’un de ses mots d’ordre favoris est « La République est une religion islamophobe », ce qui en dit long sur sa grille d’analyse. Mais pour l’occasion, le PIR est allé encore plus loin en publiant un communiqué qui prétend dire « Non au philosémitisme d’Etat » Pardon ? On y lit ceci : « Il est temps d’en finir avec tous les visages du racisme républicain dont l’islamopohobie, la négrophobie, la rromophobie et cet étrange philosémitisme ».
Résumons : non seulement l’antisémitisme est chassé de la catégorie du racisme, mais il existerait une forme nouvelle de xénophobie baptisée« philosémitisme d’Etat ». Bref, l’Etat est coupable d’allégeance envers les juifs. Sauf erreur on n’avait jamais lu ça depuis les pires atrocités sur « la France juive » et ses relents nauséabonds. A ce compte, il faut demander à Alain Soral et sa joyeuse bande d’assurer le service d’ordre idéologique de la manifestation.
Soyons clairs. Qu’une telle littérature puisse encore avoir droit de cité est proprement ahurissant. Que ceux qui crient tous les matins au retour programmé de la « bête immonde » puissent s’en accommoder relève d’une grave perte de sens commun. Que des partis de gauche ayant pignon sur rue, des syndicats reconnus ou des associations respectables (voir ci-dessous la liste dans son intégralité) puissent défiler aux côtés de gens assumant un antisémitisme décomplexé sonnent comme une défaite morale dont certains auront du mal à se remettre.
http://www.marianne.net/mouvance-antiraciste-malade-du-confusionnisme-100232163.html »
Ils n'étaient finalement que quelques centaines à porter ce message tronqué et pernicieux ce samedi 21.
Faut-il le préciser : pour nous, qui combattons le racisme et l’antisémitisme depuis toujours, ce combat va de pair avec le nécessaire combat contre le sexisme et l’obscurantisme.
Hélène Zanier